Du 22 au 28 mars, c’est la semaine internationale des doulas ! Oui, les dates sont fixes. L’avantage c’est que vous pouvez dès maintenant l’afficher sur le frigo pour vous en souvenir l’année prochaine et l’année d’après. L’inconvénient c’est que ça commence parfois un mardi, un jeudi… et que du coup ça peut paraître un peu bizarre. Ouf, la bizarrerie ne fait pas peur à la doula ! D’ailleurs, celles et ceux qui ont pris le temps de l’observer ont pu se rendre compte qu’elle était pleine de tics. Des manies, des lubies, des petits trucs incontrôlables, des détails incompréhensibles qui semblent avoir tant d’importance pour elle.
Essayons de décrypter certains de ces tics pour voir s’il ne se cacherait pas derrière un peu de l’éthique de la doula…
Les plus évidents sont les tics de langage. La doula utilise certains mots bien spécifiques, et cherche par tous les moyens à ce que ce langage soit reconnu et adopté par tous. Par exemple, si tu demandes à une doula si elle “suit” des couples en ce moment, elle te répondra immédiatement, sans même prêter attention au fond de la question, “je ne suis pas les couples, je les accompagne”. S’attacher à ce point à la forme, pour une pro de l’écoute, c’est, pfff, n’importe quoi, non? Ok, quand on “suit”, on surveille, on vérifie, on contrôle. Quand on “accompagne”, on chemine avec, on donne la main, on soutient. Est-ce vraiment si différent ? Apparemment, pour elle, oui.
Ah, et ça touche la grammaire aussi. Si tu as le malheur de parler du gynéco qui “t’a accouchée”, attends-toi à une démonstration en bonne et due forme : c’est la femme qui accouche, les personnes autour ne font que l’assister techniquement et médicalement, etc etc. Certes, mais est-ce vraiment si important ? Entre “j’ai mangé” et “on m’a mangée”, quelle différence ? Bon, pour “accoucher”, c’est pareil. Il n’y a que la doula pour penser que les formes actives et passives, agir et subir, faire et laisser faire, présentent vraiment des nuances importantes. Il y a d’autres petits tics de langage que vous avez sûrement repérés, impossible de tous les citer ici.
Ensuite il y a les réactions atypiques, qui peuvent faire penser à des tics aussi. Par exemple, le “comment ça s’est passé ?” qui tend à remplacer toute autre question. Si vous dites à une doula que vous avez fait l’écho du premier trimestre, elle ne vous demandera pas d’un air angoissé “et la clarté nucale, alors ?” mais simplement “comment ça s’est passé ?”. Quelques semaines plus tard, quand enfin le sexe aura été révélé, la doula se contentera encore d’un “comment ça s’est passé ?”. Puis après l’accouchement, même si elle vous connaît peu, même si elle n’est pas votre doula, quand les autres vous bombarderons de questions sur la taille, le poids, les cheveux qui sûrement étaient responsables de vos brûlures d’estomac, elle demandera juste en souriant “comment ça s’est passé ?”. La doula peut aussi, de façon tout à fait étonnante, ne pas poser de questions. Et ça c’est vraiment un mystère…
Et puis, il y a l’attitude générale, cette façon d’accueillir, tout, tout le temps. De sourire quand tu souris, de pleurer quand tu pleures. D’accepter tes doutes et de te ramener à l’essentiel. De rien dire quand y’a rien de pertinent. De se connecter par l’empathie plutôt que de faire appels aux réponses toutes faites. Apparemment, c’est un tic, ou une éthique, ça aussi. Quand ton chéri s’étonne “tu penses encore à ça ?”, que ta belle-mère te balance “ah mais l’épisio, c’était sûr, tu es tellement fine” (intox inside !!!) et que ta copine raconte “moi, c’était pire, la péri n’a pas marché, tu imagines ?”, la doula t’écoute sans limitation de durée et te prend dans ses bras si y’a pas de mots. Quand ton gynéco focalise sur ta prise de poids, ton chef sur ta capacité à être efficace “jusqu’au bout”, et ta sœur sur le prénom pour pouvoir commander des sorties de bain personnalisées, la doula s’intéresse juste à comment tu te sens. Quand ta mère te dit que de son temps, on laissait pleurer, que ta voisine s’arrête sur le pas de la porte en regardant ta maison apocalyptique d’un air éberlué, et que tes copines râlent parce que tu ne réponds plus au téléphone, la doula arrive avec un truc chaud à manger et te félicite d’avoir réussi à prendre une douche. Déconnectée, elle est… Ou connectée autrement ?
Enfin, la doula n’a jamais de conseils à donner, ne sait jamais si vous avez raison ou tort, elle hoche la tête. Si vous décidez d’accoucher sans péridurale, elle sourira et vous encouragera. Si vous changez d’avis dilatée à 5 après 14h de travail, elle vous sourira et vous soutiendra inconditionnellement. Une vraie girouette. Votre avis sera le sien. C’était peut-être ça qu’elle voulait dire par “accompagner” ?…
Car, vous l’aurez compris, cette éthique de langage dépasse le simple tic. Ça devient un toc. Quand on a mis le doigt dedans, on ne peut plus se comporter autrement. Et quand les femmes et les couples accompagné.e.s y ont goûté, ils ne veulent plus être traités autrement. Et tant mieux pour eux !